livrell

jeudi

Louis-Ferdinand Céline

calendrier litteraire ( 27 mai )

Powered by Blogger

(1894 - 1961)

Louis-Ferdinand Céline : , le 27 mai 1894, naît Louis Ferdinand Auguste DESTOUCHES, au 11 Rampe du pont à Courbevoie (Seine). Son père, Fernand Destouches, travaille au sein d'une compagnie d'Assurances, Le Phénix, comme correspondancier depuis 1890. Fils d'une famille de cinq enfants, une fille et quatre garçons, Fernand est né au Havre. Auguste, son père, agrégé de l'enseignement spécial, est mort depuis 1874. La famille Destouches, sous l'aile d'Hermance, veuve d'Auguste, est venue s'installer à Courbevoie en 1884. C'est là que Fernand va rencontrer Marguerite Guillou, fille de Céline Guillou. D'origine bretonne, Céline Guillou tient à Paris un commerce d'antiquités, de dentelles et porcelaines, au coin des rues de Provence et Lafayette. Le 13 juillet 1893, Fernand et Marguerite se marient et s'installent au 11 Rampe du pont à Courbevoie. Presque aussitôt après sa naissance, le petit Louis est placé chez une nourrice, d'abord dans l'Yonne, puis à Puteaux. A Courbevoie, la clientèle ne se précipite pas dans le magasin de lingerie tenu par Marguerite Destouches.

En 1897, les époux Destouches décident de s'en débarrasser et emménagent au 19 rue de Babylone, à Paris. Marguerite est contrainte de travailler dans le magasin de sa mère. Très vite, Louis rejoint ses parents rue de Babylone (avril 1897), avant qu'ils ne s'installent au 9 rue Ganneron. Louis est plongé au cœur de la capitale... En 1899, Marguerite reprend un fonds d'''objets de curiosité en boutique'' au 67 du Passage Choiseul, dans le deuxième arrondissement. Louis découvre l'école communale de la rue de Louvois, située à quelques pas de la boutique de sa mère. Ses résultats scolaires ne brillent pas comme l'attestent les commentaires du directeur de l'école: ''Enfant intelligent mais d'une paresse excessive, entretenue par la faiblesse de ses parents. Etait capable de très bien faire sous une direction ferme. Bonne instruction, éducation très relâchée''. C'est également en 1899 qu'aura lieu à Paris l'Exposition Universelle et son cortège de modernités, annonciatrice d'un vingtième siècle en mouvement.

En 1904, les Destouches déménagent dans la boutique d'en face, au 64 du Passage Choiseul. La dentelle et les objets anciens restent leur fonds de commerce. En décembre, la mort de Céline Guillou, mère de Marguerite et grand-mère de Louis, affecte durement l'enfant. Son premier vrai contact avec la mort injuste date de là. L'héritage que leur lègue Céline offre aux Destouches la possibilité d'inscrire Louis dans une école privée, l'école Saint Joseph des Tuileries en février 1905. Le 18 mai, il fait sa première communion en l'Église Saint-Roch, puis intègre en octobre 1906 l'école communale d'Argenteuil. Il décroche son certificat d'études primaires le 21 juin 1907. De toute cette période, le petit Louis Destouches gardera une nostalgie certaine du petit commerce et de la difficulté à s'y faire une place. Le Passage Choiseul marquera à jamais l'enfant, et l'écrivain Céline s'en souviendra au moment de rédiger Mort à crédit.

Entre 1907 et 1909, Louis Destouches est envoyé par ses parents en Allemagne et en Angleterre pour apprendre les langues étrangères avant de se destiner à une carrière commerciale. C'est aussi l'époque où son père, que sa condition professionnelle au sein de la compagnie d'assurances rend aigri, marque l'enfant par ses prises de position antisémites. Fin août 1907, Louis part en Allemagne, à la Mittelschule de Diepholz (Hanovre). L'enfant écrit de longues lettres à ses parents dans lesquelles son souci de l'argent transparaît. A partir de février 1909, il est inscrit à l'University School de Rochester et, un mois plus tard, change pour Pierremont Hall à Broadstairs. Ces expériences serviront également de matière au romancier narrant les péripéties du Meanwell College et du couple Merrywin...

Après son retour en France, en novembre 1909, Louis Destouches entame sa période d'apprentissage. En janvier 1910, à l'âge de 16 ans, il entre chez Raimon, rue du 4 septembre, un marchand de tissus. De septembre 1910 à mars 1911, il travaille chez Robert, un bijoutier, puis est embauché chez Wagner, un joaillier de la rue du Temple. En octobre 1911, les frères Lacloche, joailliers, l'embauchent, et l'affectent dans leur sucurssale de Nice jusqu'au 12 mai 1912. Premiers grands moments de liberté avant l'armée...

Le 21 septembre 1912, Louis Destouches devance l'appel et s'engage pour trois ans. C'est à Rambouillet, au 12e régiment de cuirassiers, qu'il effectue ses classes. Nommé Brigadier le 5 août 1913 puis Maréchal des Logis le 5 mai suivant, il partira en mission de reconnaissance avec le 12e cuirassiers dès la guerre déclarée. D'abord à Audun-le-Roman, en août, puis dans la région d'Armentières, au mois d'octobre, dans les Flandres, Louis Destouches connaît son baptême du feu. Les témoignages du jeune cuirassier Destouches l'attestent de manière claire. La guerre est une horreur absolue. Volontaire pour assurer une liaison risquée dans le secteur de Poelkapelle, entre le 66e et le 125e régiments d'infanterie, il est blessé par balle au bras droit. Opéré à Hazelbrouck, il est envoyé à l'hôpital du Val-de-Grâce à Paris et devient médaillé militaire le 24 novembre, avant de recevoir la croix de guerre avec étoile d'argent. Par la suite, Céline reviendra constamment sur les séquelles de cette blessure, auxquelles il attribuera des maux incurables. En tout cas, le Maréchal des Logis Destouches ne devait jamais se remettre véritablement du spectacle de cette guerre sanglante et destructrice... Plus tard, les ''Carnets'' écrits par le jeune soldat seront publiés en marge de Casse-pipe.

Le 27 décembre 1914, Louis Destouches est transféré à l'hospice Paul-Brousse de Villejuif, dirigé par Gustave Roussy (le docteur Bestombes dans Voyage au bout de la nuit). Opéré une seconde fois au bras droit le 19 janvier 1915, il rejoint le nouveau domicile de ses parents, 11 rue Marsollier, pour une convalescence de trois mois. Louis Destouches restera, à cause des séquelles de cette blessure au bras, invalide à 70 pour cent.

En mai, il est affecté au consulat général de France à Londres, au service des passeports. Il est réformé le 2 février 1915. Il fréquente les milieux londoniens mal famés et la pègre de Soho. Le 19 janvier 1916, il épouse Suzanne Nebout. Ce mariage ne sera pas déclaré au consulat et Louis Destouches rentrera seul en France, considéré comme célibataire par l'état français.En mars 1916, Louis Destouches est engagé comme ''surveillant de plantation'' par la compagnie forestière Sangha-Oubangui et il part en Afrique, à Bikobimbo et Campo (''Topo'' dans Voyage au bout de la nuit). Au bout de huit mois, il rompt son contrat et, en février 1917, il regagne Douala pour y être hospitalisé à la suite de crises de dysenterie. Le 10 mars, il réintègre le domicile de ses parents. Cette période passée en Afrique a permis à Louis Destouches de faire ses premiers essais littéraires (la nouvelle intitulée Des Vagues).

En septembre, il travaille avec Raoul Marquis, dit Henry de Graffigny (Courtial des Pereires dans Mort à crédit), directeur d'Euréka, une revue scientifique. Louis Destouches y signera la traduction d'un article de l'anglais en février 1918. Embauchés tous les deux par la mission Rockfeller contre la tuberculose, ils parcourent la Bretagne de mars à novembre. C'est à Rennes, le 10 mars, que Louis Destouches rencontre le docteur Athanase Follet. En novembre Louis Destouches quitte la mission et prépare le baccalauréat, dont il obtient les deux parties en avril et juillet 1919.

Il se marie avec Édith Follet, fille d'Athanase, le 10 août à Quintin (Côtes-du-Nord). Le couple s'installe à Rennes et Louis s'inscrit à l'école de médecine à partir de 1920. Le 15 juin, Édith donne naissance à Colette Destouches. En 1922, Louis Destouches effectue un stage à la maternité Tarnier à Paris, et poursuit ses études dans la capitale. Il fait un second stage obstétrical en janvier 1923 à l'hôpital Cochin. Il fréquente également le laboratoire de Félix Mesnil à l'Institut Pasteur. Edith et Louis emménagent à Paris en novembre 1923. Ce dernier soutient sa thèse le premier mai 1924, travail consacré au hongrois Philippe Ignace Semmelweis, précurseur dans la lutte contre l'infection puerpérale.

Dès le 27 juin, Louis Destouches entre à la Société des Nations, dans le service d'hygiène du docteur Ludwig Rajchman (''Yudenzweck'' dans L'Église et ''Yubelblat'' dans Bagatelles pour un massacre). Il est nommé à Genève pour trois ans. En 1925, en qualité d'accompagnateur, il conduit un groupe de médecins aux Etats-Unis, à Cuba, au Canada et en Angleterre. Entre mars et juin 1926, il est envoyé en Afrique (Nigeria, Sénégal). Ces différents voyages l'obligent à délaisser sa vie de couple et Edith obtient le divorce le 21 juin 1926. Louis Destouches commence la rédaction de L'Église. A Genève, il rencontre une danseuse américaine de 23 ans, Elisabeth Craig.

Louis Destouches passe l'été 1927 à Paris et rédige Périclès, qui deviendra Progrès. Il ouvre un cabinet médical à Clichy, au 36 rue d'Alsace, mais le manque de clientèle l'oblige à fermer début 1929. Le jeune médecin est alors nommé comme vacataire au dispensaire de Clichy, sous la direction de Grégoire Ichok. Louis s'installe au 98 rue Lepic à Paris avec Elisabeth Craig. A cette époque, il fréquente le peintre Henri Mahé, la danseuse Karen Marie Jensen, la comédienne Nane Germon.

Au printemps 1931, une secrétaire du dispensaire de Clichy, Aimée Paymal, commence la dactylographie de Voyage au bout de la nuit. Louis Destouches portera son roman chez Bossard, Figuière, Gallimard et c'est finalement Robert Denoël qui acceptera de publier Voyage au bout de la nuit. Son auteur a 38 ans et s'appelle Louis-Ferdinand Céline...

Céline, soucieux du style, va surveiller de très près la composition de son roman, finalement mis en vente le 5 octobre 1932. Le premier tirage est de 2000 exemplaires. Le 10 novembre, Céline accorde sa première interview et, le lendemain, son anonymat est levé. Il est reçu par Lucien Descaves, Léon Daudet et Jean Ajalbert, trois membres de l'académie Goncourt. Rapidement, Louis-Ferdinand Céline est annoncé comme favori pour le prix Goncourt mais, au dernier moment, quelques jurés préfèrent voter pour Les Loups de Guy Mazeline (six voix contre trois). Le scandale est immédiat et les premières querelles autour de Céline commencent. Voyage au bout de la nuit obtient le prix Renaudot et Céline répond aux journalistes tout en continuant d'exercer la médecine... Mais la grande peine de Louis Destouches en 1932 demeure la mort de Fernand, son père, le 14 mars...

En décembre 1932 il quitte Paris et part pour Genève avec sa mère. Le docteur Rajchman le nomme sur une mission en Autriche et en Allemagne et l'écrivain rédige un article, ''Pour tuer le chômage, tueront-ils les chômeurs ?''. Les fréquentations de Céline se diversifient et il commence à entretenir quelques correspondances avec Léon Daudet, Lucien Descaves, mais aussi Elie Faure, Georges Altman, Elisabeth Porquerol. Le 16 mars 1933, il publie ''Qu'on s'explique'' dans Candide afin de clore les débats autour de son roman.

Le succès de librairie est tel que Denoël publie L'Église en avril 1933, alors que son auteur parcourt l'Europe pour oublier le départ définitif d'Elizabeth Craig. Voyage est traduit en italien, en russe (par E. Triolet et L. Aragon) et en allemand. Céline se lie à Evelyne Pollet, se rapproche de Karen Marie Jensen. Il entame la rédaction de Mort à crédit, rédige la préface d'un album, 31 cité d'Antin, rassemblant des fresques d'Henri Mahé. A la recherche d'Elizabeth Craig, il part aux Etats-Unis en prétextant le lancement de l'édition américaine de Voyage, de mai à août 1934.

Le travail que lui demande son nouveau roman, d'abord intitulé ''L'Adieu à Molitor'', puis ''Tout doucement'' et enfin Mort à crédit, est colossal. En 1935, Céline se rend à Londres, Copenhague, en Autriche et se lie avec la pianiste Lucienne Delforge. 1935 est aussi l'année de sa rencontre avec Lucette Almansor... Enfin, en 1936, le manuscrit de Mort à crédit, dont les épreuves sont corrigées par Marie Canavaggia, est remis à Denoël. L'éditeur s'affole de l'obscénité de certains passages et imprime l'ouvrage en laissant des blancs. Mis en vente le 12 mai, le roman devient l'objet d'un véritable scandale orchestré par la critique et les publicitaires. Les premières rancœurs de Céline à l'égard des milieux littéraires surgissent. La critique le blesse ou l'ignore et il en est très affecté. Fin juillet, Céline part en URSS jusqu'en septembre et publie Mea Culpa la dernière semaine de décembre.

Début 1937, Céline entame la rédaction de Casse-pipe, très vite abandonnée au profit de Bagatelles pour un massacre, pamphlet écrit en six mois et publié en décembre. Les polémiques sont instantanées, même si l'accueil reste plutôt tolérant. On considère alors ce pamphlet comme une farce (André Gide), comme un réquisitoire naïf... Céline démissionne du dispensaire de Clichy et, en 1938, compose à Dinard un nouveau pamphlet pacifiste et antisémite, L'Ecole des cadavres. L'écrivain est unanimement rejeté par la gauche qui avait encensé Voyage.

En mai 1939, le décret Marchandeau oblige Denoël à retirer de la vente ces deux pamphlets. Céline est exclu de la vie littéraire. En proie à de violentes polémiques, une lettre adressée à Je suis partout le 21 juillet dénote de son état d'esprit : ''Mes livres sont retirés de la circulation... Moi aussi.''

En septembre, le docteur Destouches ouvre un cabinet à Saint-Germain en Laye, puis revient chez sa mère, rue Marsollier. Le 9 novembre, il est réformé définitivement et déclaré invalide à 70 pour 100. En qualité de médecin, il s'embarque sur le ''Chella''. Le navire sera accidenté et Céline rapatrié. Nommé au dispensaire de Sartrouville, il part en exode à La Rochelle au volant d'une ambulance avec Lucette.

Après la défaite, Céline s'installe 4 rue Girardon à Paris et écrit ''Notre Dame de la débinette'', publié en février 1941 sous le titre Les beaux draps par les ''Nouvelles Editions Françaises'', une succursale de Denoël. Céline envoie une trentaine de lettres à différents journaux pour y parler de son antisémitisme. Pourtant, il refuse obstinément de rallier un quelconque parti politique ou un journal.

A partir de 1942, il cesse ses interventions publiques, écrit Scandale aux Abysses et l'essentiel de Guignol's Band. Denoël réimprime ses pamphlets. Voyage et Mort sont réédités, enrichis d'illustrations de Gen Paul. Le 23 février 1943, Louis Destouches épouse Lucette Almansor à la mairie du 18ème arrondissement de Paris. Ils passent l'été à Saint-Malo. Céline préface le livre d'Albert Serouille, Bezons à travers les âges, qui paraît en janvier 1944. L'écrivain est alors médecin-chef du dispensaire de Bezons.

Le couple Destouches quitte Paris en juin 1944. Il séjourne à Baden-Baden où se trouve l'acteur Robert Le Vigan. Face à l'impossibilité de passer au Danemark, où Céline a déposé de l'or depuis plusieurs années, le couple se rend à Neu Ruppin, près de Krantzlin, chez la famille Scherz. En octobre, le couple, accompagné du chat Bébert et de Le Vigan, parvient à Sigmaringen. Céline loge à l'extérieur du château et soigne les réfugiés. Enfin, le 27 mars 1945, les Destouches réussissent à passer au Danemark et à atteindre Copenhague malgré les bombardements.

Céline et sa femme s'installent chez Karen Marie Jensen. Le 6 mars, l'écrivain apprend la mort de sa mère, bientôt suivie de l'assassinat de Robert Denoël le 3 décembre. Le 19 avril 1945, le juge d'instruction de la Cour de justice de la Seine lance un mandat contre Céline, qui reste sans effets. L'avocat Thorvald Mikkelsen légalise la présence de Céline au Danemark, pendant que ce dernier reprend le manuscrit de Guignol's band 2, commencé à Paris, et qu'il réfléchit au projet de Féerie pour une autre fois.

Le 17 décembre, la légation française au Danemark demande l'extradition de Céline. Il est immédiatement écroué avec Lucette, et incarcéré à Vestre Faengsel. Lucette est libérée le 28 mais Céline, que l'état danois refuse d'extrader, demeure en prison près de onze mois. Le 6 novembre 1946, Céline signe un texte intitulé ''Réponses aux accusations formulées contre moi par la justice française au titre de trahison et reproduites par la police judiciaire danoise au cours de mes interrogatoires, pendant mon incarcération 1945-1946 à Copenhague''. Le 8, il est transféré au Sundby Hospital, puis à l'infirmerie de Vestre Faengsel le 24 janvier 1947. Le 26 février, Céline, pesant 62 kilos, entre au Rigshospital, un établissement civil. Le 24 juin, il promet de ''ne pas quitter le Danemark sans permission des autorités danoises''.

Il rejoint Lucette à Kronprinsessegade, achève Guignol's 2, reprend Féerie et ce qui deviendra Foudres et flèches. Le 19 mai 1948, Céline et Lucette emménagent à Klarskovgaard, près de Korsør, sur la mer Baltique, dans un pavillon appartenant à Thorvald Mikkelsen. Céline entretient une correspondance très abondante et quelques proches lui rendent visite : Pierre Monnier, Daragnès, Henri Mahé... Il rencontre Milton Hindus, un jeune professeur américain, mais leur amitié sera rapidement brisée.

Fin 48, Casse-pipe est publié d'abord dans Les Cahiers de la pléiade par Jean Paulhan, puis chez Frédéric Chambriand (maison d'édition créée par Pierre Monnier), ainsi que Foudres et flèches. Albert Paraz, dans Le gala des vaches, insère A l'agité du bocal, réponse de Céline à des accusations formulées par J.-P. Sartre, ainsi que leur correspondance. Voyage est réédité par Jacques Frémenger (Ed. Froissart, Bruxelles).

Le 17 octobre 1949, la Cour de justice de la Seine arrête les poursuites engagées contre Céline et le 3 décembre le commissaire du gouvernement réclame à son encontre l'application de la loi pénale concernant les délits mineurs contre la sureté de l'état. Le 25 janvier 1950, le président de la Cour de justice de la Seine convoque Céline et l'annonce de son procès est commenté dans la presse. Le 21 février 1950, la Cour de justice rend son arrêt. Céline est condamné à un an d'emprisonnement, à 50000 francs d'amende et à l'indignité nationale.

En mai paraît L.-F. Céline tel que je l'ai vu de Milton Hindus qui expose la brouille entre les deux hommes. Pierre Monnier publie Mort à crédit en avril 1950 et Scandale aux Abysses en novembre. Paraz, dans Valsez saucisses, continue de plaider en faveur de Céline. Le 25 avril 1951, le tribunal militaire de Paris ordonne l'amnisitie de Louis Destouches.

Enfin, le 1er juillet 1951, Céline, Lucette, leurs chiens et le chat Bébert rentrent en France et atterrissent à l'aéroport de Nice. Les Destouches passent l'été chez Paul Marteau, à Nice, rendent visite aux parents de Lucette domiciliés à Menton et à Albert Paraz, à Vence. Céline signe en juillet un contrat avec les éditions Gallimard. En septembre, le couple emménage à Meudon, au 25 ter route des Gardes. Lucette ouvre un cours de danse et Céline un cabinet médical.

Au même moment, Céline intente un procès aux éditions Julliard qui viennent de publier le Journal d'Ernst Jünger. L'écrivain s'estime diffamé et Ernst Jünger reconnaît lui-même que son éditeur français a effectué une modification de son texte (le nom de ''Merlin'' est devenu ''Céline''...). Entre mars et mai 52 les éditions Gallimard réimpriment toute l'œuvre de Céline hormis les pamphlets. Féerie pour une autre fois est publié en juin. La critique boude le nouveau roman de Céline et, à de rares exceptions près (Gaëtan Picon, Maurice Nadeau, Roger Nimier, Jean Paulhan et évidemment Albert Paraz), elle demeure muette.

En janvier 1953, André Parinaud publie la première interview de Céline depuis son retour d'exil (voir Céline et son art). Cette initiative a peu d'impact et Céline achève Normance, la seconde partie de Féerie, publié en juin 1954 et dont le succès reste aussi confidentiel. La Nouvelle Revue Française édite en cinq livraisons Entretiens avec le Professeur Y, qui ne rallume toujours pas les passions des lecteurs. Voyage est réédité en collection de poche et au ''Club du Meilleur Livre''. Cela offre à Céline l'occasion de donner une longue interview, la première d'une très longue série. Finalement, Entretiens avec le Professeur Y paraît chez Gallimard en juin 1955.

A partir de 1956, les lecteurs de Céline se font plus nombreux, grâce à la diffusion de Voyage en poche et à un reportage publié dans Paris Match présentant l'écrivain en compagnie de Michel Simon et d'Arletty à l'occasion de l'enregistrement d'un disque. Céline est en train de rédiger D'un château l'autre et de plus en plus de journalistes viennent à Meudon pour l'interviewer. Dans son pavillon, l'écrivain cultive son décor et son personnage.

D'un château l'autre est édité en 1957 et Céline est l'invité de Lecture pour tous, l'émission télévisée de Pierre Dumayet. L'accueil de ce nouveau roman est favorable. Quelques débats reprennent, opposant les pros et les antis Céline. Il écrit alors Vive l'aministie, monsieur ! pour faire cesser les polémiques. Mort à crédit est publié en édition de poche, avec les fameux blancs.

A partir de 1959, des universitaires commencent à s'intéresser de près à Céline. Gallimard, en mai, réédite les ballets de l'écrivain sous le titre Ballets sans musique sans personne sans rien, illustrés par Éliane Bonabel. L'équipe d'En français dans le texte enregistre une émission télévisée à Meudon mais des protestations en font interdire la diffusion.

En mai 1960 paraît Nord, la suite de D'un château l'autre. Céline travaille sur plusieurs projets, notamment l'adaptation cinématographique de Voyage au bout de la nuit par Claude Autan-Lara et son entrée dans la ''Bibliothèque de la Pléiade'' pour laquelle il réécrit les passages censurés de l'édition originale de Mort à crédit (il faut noter que l'actuelle édition Folio reprend cette version ''remaniée'' et aseptisée). Céline entame également ''Colin-Maillard'' qui deviendra Rigodon. Le 30 juin 1961 il a enfin achevé la deuxième version de ce roman. Le lendemain, le 1er juillet, à 18 heures, Louis-Ferdinand Céline meurt d'une rupture d'anévrisme. Son décès ne sera annoncé par la presse que le 4, après son inhumation au cimetière de Meudon.

Romans

Voyage au bout de la nuit ( 1932 )
Mort à crédit ( 1936 )
Guignol's band ( 1944 )
Casse-pipe ( 1949 )
Féerie pour une autre fois ( 1952 )
Normance : Féerie pour une autre fois II ( 1954 )
D'un château l'autre ( 1957 )
Nord ( 1960 )

Le Pont de Londres : Guignol's band II ( 1964 )
Rigodon ( 1969 )


Voyage au bout de la nuit de Louis Ferdinand Celine

Voyage au bout de la nuit est le premier roman de Céline, publié en 1932. Ce livre manque de très peu le prix Goncourt (de deux voix seulement), mais obtient tout de même le prix Renaudot. Il s'inspire principalement de l'expérience personnelle de Céline au travers de son personnage principal Ferdinand Bardamu : Louis-Ferdinand Destouches a participé à la Première Guerre mondiale en 1914. Celle-ci lui a révélé l'absurdité du monde et sa folie, allant même jusqu'à la qualifier « d'abattoir international en folie ». Il expose ainsi ce qui est pour lui la seule façon raisonnable de résister à une telle folie : la lâcheté. Il est hostile à toute forme d'héroïsme, celui-ci même qui va de pair avec la guerre. Pour lui, la guerre ne fait que présenter le monde sous la forme d'un gant, mais un gant que l'on aurait retourné, et dont on verrait l'intérieur. Ce qui amène à la trame fondamentale du livre : la pourriture et sa mise à évidence.

Résumé du roman

Paris, place de Clichy, 1914. Envoûté par la musique d'une parade militaire, Ferdinand Bardamu, jeune rebelle, décide, par excès d'héroïsme, de s'engager dans la guerre contre les Allemands. Mais au front, c'est l'enfer et l'absurdité. Il perd vite son enthousiasme et découvre avec épouvante les horreurs de la guerre. Il ne comprend plus pourquoi il doit tirer sur les Allemands. Il prend aussi conscience de sa propre lâcheté.

On lui confie une mission de reconnaissance. Lors d'une nuit d'errance, il rencontre un réserviste nommé Robinson qui cherche à déserter. Ils envisagent de s'enfuir, mais leur tentative échoue. Blessé, traumatisé à jamais par la guerre, Bardamu revient à Paris pour être soigné. On lui remet une médaille militaire. Lors de cette cérémonie, il fait la connaissance de Lola, une jeune et jolie infirmière américaine. Bardamu est soigné dans différents hôpitaux. Il prend conscience des avantages et profits que tirent de la guerre tous ceux qui y ont échappé.

Lola, compagne futile et légère, le quitte. Il rencontre alors Musyne, une jeune violoniste. Ils ont une aventure, mais, un jour de bombardement, elle l'abandonne.

Réformé, Bardamu décide de partir pour l'Afrique. Il y découvre les horreurs de l'exploitation coloniale. Il retrouve Robinson, rencontré sur les champs de bataille, et lui succède en reprenant la gérance d'un comptoir commercial. Il tombe malade et connaît des crises de délire.

Il quitte l'Afrique à demi-mort à bord d'un bâtiment espagnol qui a tout d'une galère. Ce bateau l'emmène jusqu'à New-York . Dès son arrivée, il est placé en quarantaine . Dans cette ville à laquelle, il a tant rêvé, il ne connaît que solitude et pauvreté. Il part à Détroit pour y travailler. Il rencontre Molly, une prostituée généreuse qui le délivre de l'enfer de l'usine Ford . Molly aime Bardamu , l'entretient et lui propose de partager son bonheur. Mais son désir d'explorer plus avant l'existence le pousse à renoncer à cette femme généreuse. Il quitte les Etats-Unis et revient à Paris. Il rentre le cœur gonflé et meurtri par toutes ces expériences.

Devenu médecin , mais menant une existence toujours aussi misérable, il s'installe à Rancy, banlieue triste et pauvre. Il y découvre les côtés les plus répugnants et les plus désespérants de la condition humaine. Il assiste impuissant à la mort de Bébert, un petit garçon qu'il aimait bien et que la science ne peut sauver. Puis il se retrouvé mêlé à une sordide histoire. Une famille de sa clientèle, les Henrouille, souhaitent se débarrasser de leur mère âgée. Ils font appel à Robinson qui accepte de tuer la vieille dame pour dix mille francs. Mais par maladresse, Robinson échoue et se blesse. Il perd provisoirement la vue. Bardamu soigne Robinson qui part ensuite s'exiler à Toulouse en compagnie de la mère Henrouille, sa victime rescapée.

Bardamu quitte Rançy et abandonne la médecine. Il devient figurant dans un spectacle de danse. Il se rend ensuite à Toulouse et retrouve Robinson. Il fait la connaissance de Madelon , sa fiancée et devient son amant. Il fait visiter avec la mère Henrouille un caveau plein de cadavres à des touristes. Mais la vieille dame tombe dans l'escalier, vraisemblablement poussée par Bardamu, et se tue. Robinson incite son compère à regagner Paris.

Il est engagé comme médecin dans un établissement psychiatrique dont le patron est le docteur Baryton. Les deux hommes sympathisent.

Rapidement, Baryton sombre dans la folie et annonce à Bardamu sa décision de partir : " je vais renaître, Ferdinand." Il confie à Bardamu la direction de la clinique. Robinson reparaît au grand regret de son ami. Il a recouvré la vue et a quitté Madelon. Bardamu le cache dans sa clinique pour le soustraire à Madelon qui, amoureuse, le poursuit. Sophie, une superbe infirmière slovaque, qui est devenue la maîtresse de Bardamu, prêche pour la réconciliation entre Robinson et Madelon. Bardamu propose une sortie à la fête des Batignolles afin de réconcilier tout le monde. Robinson refuse les avances de Madelon dans le taxi et avoue son dégoût des grands sentiments Madelon le tue de trois coups de revolver. Après l'agonie de Robinson, Bardamu se retrouve seul en bordure d'un canal. Un remorqueur siffle au loin comme s'il souhaitait emmener avec lui tout ce qui existe : " tout , qu'on n'en parle plus."

Quelques critiques de Voyage au bout de la nuit

Il faut relire Céline en le voyant. Céline a dit la vérité du siècle : ce qui est là est là , irréfutable, débile, monstrueux, rarement dansant et vivable.

Philippe Sollers in Céline, Voyage au bout de la Nuit, Gallimard

Saisissante épopée de la révolte et du dégoût , long cauchemar visionnaire ruisselant d'invention verbale , et dominé par l'inoubliable figure de Bardamu, Le Voyage a exercé une action considérable . Céline fut l'un des premiers à vivre ce dont la littérature actuelle allait bientôt se nourrir presque exclusivement : l'absurdité de la vie humaine.

Gaëtan Picon, Panorama de la Nouvelle littérature française, Gallimard, 1976

Pour nous la question n'est pas de savoir si la peinture de M. Céline est atroce, nous demandons si elle est vraie. Elle l'est. Et plus vrai encore que la peinture , ce langage inouï, comble du naturel et de l'artifice, inventé, créé de toutes pièces à l'exemple de la tragédie , aussi loin que possible d'une reproduction servile du langage des misérables, mais fait justement pour exprimer ce que le langage des misérables ne saura jamais exprimer, la sombre enfance des misérables.

Bernanos, Le Figaro, décembre 1932

Le style de Céline est subordonné à sa perception du monde. A travers ce style rapide qui semblerait négligé, incorrect, passionné, vit, jaillit et palpite la réelle richesse de la culture française, l'expérience affective et intellectuelle d'une grande nation dans toute sa richesse et ses plus fines nuances. Et, en même temps, Céline écrit comme s'il était le premier à se colleter avec le langage. L'artiste secoue de fond en comble le vocabulaire de la littérature française.

Léon Trotski, Littérature et révolution

Premières et dernières phrases de Voyage au bout de la nuit

Début du roman

" ça a débuté comme ça. Moi , j'avais jamais rien dit. Rien. C'est Arthur Ganate qui m'a fait parler. Arthur, un étudiant, un carabin lui aussi, un camarade...."

Fin du roman

" De loin, le remorqueur a sifflé ; son appel a passé le pont, encore une arche, une autre, l'écluse, un autre pont, loin, plus loin... Il appelait vers lui toutes les péniches du fleuve toutes, et la ville entière, et le ciel et la campagne, et nous, tout qu'il emmenait, la Seine aussi, tout, qu'on n'en parle plus. "

Quelques citations de Voyage au bout de la nuit

L'amour, c'est l'infini à la portée des caniches.

Quand on a pas d'imagination, mourir c'est peu de chose, quand on en a, mourir c'est trop.

Le cinéma, ce nouveau petit salarié de nos rêves on peut l'acheter lui, se le procurer pour une heure ou deux, comme un prostitué.

Faire confiance aux hommes, c'est déjà se faire tuer un peu.

On n'est jamais très mécontent qu'un adulte s'en aille, ça fait toujours une vache de moins sur la terre, qu'on se dit, tandis que pour un enfant, c'est tout de même moins sûr. Il y a l'avenir.

Mort à crédit de Louis Ferdinand Celine

Mort à crédit est un roman de Louis-Ferdinand Céline paru en 1936 aux Éditions Denoël.
Il a aussi été illustré par Jacques Tardi dans la collection Futuropolis de Gallimard en 1991.

« Ça avait en fait débuté comme ça »

Après le succès retentissant de Voyage au bout de la nuit, Céline entame très vite un nouveau roman. Ce sera d’abord Tout Doucement, puis Chanson Morte, qui donnera finalement Mort à Crédit. Céline veut illustrer par ce titre l’étouffement des petits commerçants croulant sous les crédits.

Si le Voyage commençait par « Ça a débuté comme ça », Mort à crédit nous donne plus de précisions. « Ça », avait débuté bien avant le 27 mai 1894 à Courbevoie. L’histoire célinienne prend donc un nouveau départ. Dans le projet initial, Céline avait pensé à une histoire en trois temps : « Enfance, Guerre, Londres ». Finalement Mort à crédit et ses 622 pages ne couvriront que la période de l’enfance. Le service militaire sera décrit dans Casse-pipe et Londres dans Guignol’s Band I et II. Fait nouveau, le personnage ne s’appelle plus Bardamu, mais Ferdinand. L’aveu complet de l’autobiographie, à prendre toutefois avec précaution, car Céline poussera son histoire dans toutes les dramatisations possibles.

Parties du roman

Le roman est divisé en trois blocs :
La première partie est la dramatisation d'un episode d'enfance : une baignade terrifiante.
Les deux parties suivantes sont l'humour et le registre satirique, et l'originalité d'un style quasiment unique

Roger-Marin Courtial des Pereires

Personnage peut-être le plus mémorable de l'œuvre célinienne (après Bardamu et les autres avatars de l'auteur), l'inventeur Roger-Marin Courtial des Pereires, savant farfelu mais universel, figure tout à la fois géniale et grotesque, est inspiré d'Henry de Graffigny, que Céline a cotoyé à la fin de la Première guerre mondiale.

Le livre de la violence

Avec les bagarres entre camarades, la mort de Madame Bérenge ou le suicide de Courtial, le lecteur est entraîné par un courant de violence, puis d’expériences sexuelles, qui feront de Mort à Crédit un livre bien plus osé que le Voyage. On y retrouve le gout de Céline pour les descriptions collectives hallucinées... souvent empruntes de scatologie : le "choeur des vomissants" sur le navire qui l'emmène lui et sa famille en Angleterre, les foules exhibitionnistes dans les parcs, la horde de participants au concours d'inventions... De plus, la route de Ferdinand semble marquée du sceau de l'échec : echecs personnels du heros d'abord, echec du mariage des parents qu'on devine forcé, echecs professionnels accumulés de ceux-ci, echec final de Courtial, pourtant inventeur et redacteur doué. Tout semble illustrer le titre de l'oeuvre : nous sommes tous des morts à crédit.

Résumé de l'œuvre

La jeunesse de Céline se passe entre les reproches quotidiens de ses parents et la bonté de son oncle Edouard. Puis il y a ses expériences qui ne font qu'accroître les déboires de ses bons parents. Engagé chez Mr Gorloge, après un moment de volupté passé avec sa femme, le petit Ferdinand est renvoyé de son deuxième travail. Un piège de la femme qui vole le bijou que Ferdinand était chargé de remettre à un client.

A la maison, c'est encore une tempête de dispute. Etouffé par cette atmosphère, Ferdinand se bat avec son père. L'oncle Edouard le tire encore une fois de l'embarras en le plaçant chez Courtial des Pereires, un inventeur loufoque. Mais l'inventeur de génie n'est en fait qu'un escroc. Après un scandale, il est obligé de s'installer dans un village de province. Une fois là-bas, il applique sa nouvelle méthode pour faire pousser des pommes de terre géantes mais celle-ci ne marche pas. Courtial est en faillite et finit par se suicider
Ferdinand retourne à Paris. L'oncle Edouard lui propose son aide. Il refuse et veut s'engager dans l'armée

D'un château l'autre de Louis Ferdinand Celine

D'un château l'autre est un roman de Louis-Ferdinand Céline publié en 1957 aux éditions Gallimard. Il dresse un parallèle entre la vie de Céline contemporaine à l'œuvre - en tant que médecin et écrivain, pauvre, maudit et boudé par sa clientèle - et sa vie à Sigmaringen où se sont réfugiés le gouvernement de Vichy et de nombreux collaborateurs devant l'avancée de l'armée du général Leclerc .

Résumé de l'œuvre

<<> >>

Comme toujours depuis Mort à crédit, ce roman s'ouvre sur les descriptions d'un Céline aigri qui se plaint de sa condition : les traîtrises des divers éditeurs qu'il voudrait voir s'étriper, ses haines à l'égard de ceux qui représentent l'intelligentsia de l'époque – « tartre » (Jean-Paul Sartre), « Larengon » (Louis Aragon) ou encore André Malraux, André Maurois ou Paul Morand –, sa vie de médecin boudé par sa clientèle. Pourtant, au-delà des aigreurs, Céline se réjouit de la fidélité de quelques clients, et notamment Mme Niçois, dont l'appartement fait face à une voie fluviale au bord de laquelle il croise le chemin de son ancien ami Robert Le Vigan (« La Vigue » dans le roman), reconverti en locataire d'une péniche, La publique. L'entrevue des deux anciens compères donne lieu à un échange verbal cru et agressif qui, combiné au froid de l'hiver, rend le Docteur Céline souffreteux.

Alité, malade, Céline commence à décrire la vie à Sigmaringen, passant d'un château à l'autre sans transition (d'où la syntaxe étrange du titre du roman) : du château symbolique de sa demeure en banlieue parisienne au château de Sigmaringen, abritant le gouvernement de Vichy en exil. Cette deuxième partie du roman laisse place au rêve, à la fantaisie et à la description du grotesque de la vie des réfugiés politiques français. Résidant au Löwen, nourri de Stamgericht (plat écœurant à base de choux rouges et de raves), affecté à Sigmaringen en tant que médecin, Céline décrit les péripéties de la France collaboratrice. Tout y est description du ridicule ambiant : la promenade journalière du maréchal Pétain, toute baignée de protocole, la rigidité des Allemands, les rêves fous des idéalistes ou encore d'artistes espérant encore la victoire de l'Allemagne, les orgies entre militaires, jeunes filles en fleur et réfugiées, la misère humaine dûe à l'absence de service sanitaire, à la restriction des médicaments et des institutions réduites à des scènes de théâtre ou encore les entreprises vouées à l'échec pour préserver un semblant de dignité (voyage officiel vers Hohenlychen, réceptions officielles etc.). Cette partie, où l'on croise plusieurs figures historiques (Pétain, Pierre Laval, Otto Abetz, Fernand de Brinon, Alphonse de Châteaubriant, Jean Bichelonne...), sans ligne narrative précise est une ensemble hétéroclite de saynètes et de descriptions loufoques renforçant l'idée de chaos inhérent à la débacle des derniers pontes du collaborationnisme et des fidèles de Vichy, tout en étant un parallèle à la situation maladive de Céline, à laquelle il est fait référence par quelque endroit. Le récit se clôt sur le rétablissement de Céline et l'actualité de sa malade Mme Niçois laissant supposer le récit fait des aventures à Sigmaringen comme un digression, comme une parenthèse dans l'Histoire .

Site louis ferdinand celine [ Fr ]

louis ferdinand celine [ En ]




0 commentaires:

Enregistrer un commentaire

Abonnement Publier les commentaires [Atom]

<< Accueil